Située à deux pas de Sparte, qu'elle domine de toute la splendeur de ses ruines, la cité byzantine de Mystra se dresse fièrement sur les pentes du Mont Taygète. Site archéologique classé au patrimoine mondial de l'UNESCO depuis 1989, Mystra - ou Mystras - est sans doute une des villes médiévales les mieux conservées du Péloponnèse. Pour nous, elle figure certainement parmi les plus belles.
Après notre plongeon dans l'histoire et le patrimoine de la Grèce antique - à Corinthe et Mycènes notamment - et une incursion dans les montagnes - à Dimitsana, en Arcadie - , nous poursuivons ici notre road trip à travers le Péloponnèse, commencé à Athènes quelques jours plus tôt. Et c'est à un véritable coup de coeur que nous avons droit : la "Merveille de Morée" nous offre en effet un autre voyage dans le temps, accessible et fascinant de bout en bout.
Tranchant indiscutablement avec les ruines des sites de la Grèce classique, les monuments historiques admirablement conservés - et pour certains, restaurés - de Mystras permettent de se projeter assez facilement et d'imaginer combien l'influence artistique, intellectuelle et culturelle de la cité rayonnait lorsqu'elle était une des capitales provinciales florissantes de l'Etat byzantin.
Parfaitement intégrée en outre dans un environnement naturel de toute beauté, la ville dégage une atmosphère véritablement poétique, conférée par les multiples ruelles qui serpentent encore dans les fortifications, et l'esthétique romantique des maisons, palais, églises et monastères.
C'est donc au sud-est du Péloponnèse, dans la province de Laconie, que je vous emmène en voyage aujourd'hui. Nous partons découvrir les mystères de Mystra, une cité extraordinaire et oubliée, aux portes de l'illustre Sparte.
Mystra : histoire et patrimoine médiéval de la Grèce continentale
Fondée en 1249 par un Franc, Guillaume II de Villehardouin, Mystra subit de multiples influences au cours du temps : en 1262, elle passe aux mains des Byzantins et devient le siège du despotat de Morée en 1348; enfin, en 1460, elle est prise par les Turcs puis par les Vénitiens. A noter aussi le passage des Russes, des Albanais et des Egyptiens, avec à leur tête, Ibrahim Pacha, en 1825.
En 1834, la fondation de la ville moderne de Sparte par le roi Otto signe définitivement la désertion progressive de Mystra, ses habitants préférant s'installer dans une nouvelle cité.
Seules quelques nonnes vivent encore actuellement sur le site historique.
Classée depuis 1989 au patrimoine mondial de l'UNESCO, la cité byzantine est l'objet de nombreuses restaurations.
Visiter Mystra en un jour : ce qu'il ne faut pas manquer
Si Sparte n'a plus le lustre qu'elle devait avoir autrefois, force est de constater que Mystra, elle, séduit toujours par son histoire, la richesse de son architecture, les peintures grandioses qui ornent ses églises et les superbes panoramas qu'elle offre sur la plaine et les monts avoisinants.
Avant de vous emmener découvrir les merveilles de l'ancienne cité byzantine, je tiens à préciser que la disposition des lieux et l'étendue du site implique une journée complète de visite. Pour votre confort, il vaut sincèrement mieux disposer d'un logement sur place. (Voir mini-guide pratique, en fin d'article.)
Parmi les lieux à ne pas manquer, si vous devez vous fixer des priorités, je vous conseille particulièrement ceux-ci:
1. La Métropole
2. L'Hogiditria
3. Le Pantanassa
4. Le Péribleptos
5. La Forteresse
6. Sainte-Sophie
7. Les Palais des despotes
Le matin : visiter la Ville basse
La matinée est déjà bien avancée lorsque nous atteignons la porte de la Ville basse. Nous avons en effet bien profité de notre petit-déjeuner et nous ne nous sommes pas pressés.
Fort heureusement, les touristes n'ont pas encore envahi les lieux. D'ailleurs, il ne sera jamais question d "invasion", contrairement à ce que nous avons vécu à Mycène, malheureusement archi-bondée lors de notre passage.
Construite sur le modèle d'une ville fortifiée byzantine, Mystra se divise en trois parties: la forteresse, située en haut de la colline, occupe une position naturelle stratégique; ensuite, les résidences de l'aristocratie et le centre administratif sont regroupés dans la ville haute, protégés par une muraille intérieure; enfin, la cathédrale, les monastères et les quartiers résidentiels se situent dans la ville basse, ceinturée elle aussi par de hauts murs protecteurs.
A l'époque, les paysans vivent à l'extérieur de la ville mais ils peuvent se réfugier dans l'enceinte, en cas de danger.
Passer la porte de la ville basse, c'est pénétrer dans un autre monde, lointain certes, mais dans lequel il est facile de se projeter, vu l'état de conservation des bâtiments. À droite de l'ancienne rue centrale, nous découvrons le premier complexe ecclésiastique de Mystra: Metropolis . Cet ensemble comprend l'église Saint-Démétrios, des bâtiments épiscopaux et plusieurs cours intérieures, arborées et fleuries.
L'église Saint-Démétrios, édifiée fin du 13ème siècle sur le modèle de la basilique byzantine à trois nefs, comprend de superbes fresques murales. Si l'ensemble ravirait tout historien ou spécialiste de l'art, le plus néophyte d'entre nous ne peut y rester insensible.
Personnellement, je n'ai aucune formation particulière dans le domaine de l'art mais j'ai un véritable coup de coeur pour l'architecture byzantine. Si je m'écoutais, je prendrais une journée entière pour visiter la ville basse. (Cet attrait pour l'art byzantin se confirmera d'ailleurs quelques jours plus tard, lors de notre visite de Monemvasia, plus au sud.)
La grande cour donne accès à un petit musée. Celui-ci regorge de trésors: sculptures, fresques, icônes, livres, provenant de Sparte ou de Mystra.
Un peu plus loin, la première église du monastère du Brontochion, le plus ancien et le plus riche de Mystra, est dédiée à des saints militaires: les Saints Theodores, apparemment très appréciés des Byzantins.
L'Hodigitria, l'église principale du monastère du Brontochion, bâtie vers 1310, est dédiée à la Vierge "qui montre le chemin". Elle est pour moi, l'une des plus belles de Mystra. Son architecture complexe et la richesse de ses peintures murales sont impressionnantes.
Parmi les magnifiques fresques qui ornent ses murs, la représentation de la "Vierge Source de vie" et la composition symbolisant les guérisons de l'aveugle et de la belle-mère de Pierre retiennent mon attention.
Mais mon regard finit par se perdre: mes yeux passent d'une fresque à l'autre; chacune me procure une émotion nouvelle. Je dois bien l'admettre : je suis loin d'être une fan de l'art religieux; pourtant, là, dans cette église, je savoure mon moment et contemple avec délectation ces tableaux polychromes mis en valeur par les murs bruts et clairs.
Un peu - beaucoup! - plus haut, le monastère de la Vierge Pantanassa - qui signifie Reine de tous - , remarquablement fleuri, est toujours habité. Des nonnes s'occupent de son entretien et, à certaines heures, le couvent est accessible. Ses occupantes se réjouissent d'ailleurs d'accueillir les visiteurs (décemment vêtus, de préférence) et leur proposent des icônes ou des broderies …
Entre nous, rien de bien intéressant, mais allez-y, juste pour le plaisir de la rencontre et celui de contribuer faiblement, si vous achetez quelque chose, à l'entretien de ce monastère. Vous noterez au passage que les nonnes, dont vous apercevez les espaces privés sur la photo de droite, ci-dessous, se sont réservé une vue extraordinaire sur la plaine de Sparte. (Vous vous en rendrez bien compte, plus loin, sur une autre photo.)
Situé à l'autre extrémité de la ville basse, par rapport au monastère du Brontochion, le monastère du Peribleptos est construit contre la roche et est entouré de verdure. Le lieu séduit indiscutablement, malgré la chaleur et la fatigue. Le site offre également une très belle vue sur la vallée.
Après cette dernière visite dans la Ville basse, nous quittons Mystra quelques heures, évitant ainsi l'overdose et les heures - trop - chaudes de ce début juillet.
L'après-midi : visiter la Ville haute
En fin d'après-midi , nous nous présentons à l'entrée de la Ville haute. Malheureusement , les Palais des Despotes sont inaccessibles pour cause de rénovation - Vous pouvez maintenant les visiter - ; nous décidons donc de grimper directement vers l'acropole.
De manière à ce que vous puissiez vous rendre compte du dénivelé, je vous partage une vue du site, prise de notre maison d'hôtes. Imaginez cela sous la chaleur des mois d'été ...
Cette acropole a certainement d'autres atouts à faire valoir que le simple attrait paysager mais il faut bien admettre que la visite du site requiert une telle énergie, qu'une fois en haut, notre intérêt se limite à profiter du panorama.
En redescendant, nous nous arrêtons à Sainte- Sophie, l'église du palais, érigée par le premier Despote de Morée dans la deuxième moitié du 14ème siècle. L'édifice est entouré par les vestiges des maisons des nobles et surplombe les palais et la place centrale.
Noyée dans une profusion de verdure, cette partie du site historique est particulièrement impressionnante.
La journée a été longue. Seule la découverte d'une sauterelle et d'une tortue parvient encore à retenir notre fille.
Mystra la magnifique nous a épuisés. Mais nous partons la tête remplie de beaux souvenirs et le coeur émerveillé. Un jour, c'est certain, nous reviendrons.
Visiter Mystra : ce qu'il faut savoir avant de partir
Comment profiter au mieux de sa visite
Mystra est vaste et très pentue. Chaque partie de la ville dispose de sa propre entrée et le ticket vous permet de scinder votre visite sur la journée. Par conséquent, si vous logez aux environs (ce que je vous conseille vivement), le mieux est de visiter une partie le matin et l'autre partie l'après-midi. Comptez un minimum de 2h30 pour chaque partie.
Nous avons personnellement exploré la ville basse le matin, la ville haute et la forteresse en fin d'après-midi. Ce fractionnement nous a permis de nous reposer pendant les heures les plus chaudes et de profiter pleinement de notre visite.
Visiter Mystra, avec ou sans guide
Il n'y a pas de guide officiel sur place. Si vous souhaitez une visite guidée, il faut alors s'adresser à une agence spécialisée.
En ce qui nous concerne, nous optons rarement pour une visite guidée (même si de temps en temps, je l'avoue, cette option s'avérerait particulièrement utile!) . Dans le cas de Mystra, l'étendue du site et le temps nécessaire à une visite complète me confortent dans l'idée que prendre un guide n'est pas opportun.
Par contre, je recommande particulièrement de se documenter avant, de manière à visualiser le site et d'avoir un aperçu des principaux bâtiments. Un dépliant (en grec et en anglais) remis avec votre billet d'entrée, et des panneaux d'information (idem), dispersés à certains endroits stratégiques, fournissent quelques renseignements mais ce n'est pas suffisant.
Nous avons acheté sur place, avant la visite, un guide réalisé par l'ex-Directrice du musée byzantin d'Athènes. Celui-ci nous a permis de compléter les informations dont nous disposions déjà.
Où dormir et manger à Mystra
Nous avons eu un véritable coup de coeur pour notre maison d'hôtes et pour le restaurant où nous avons eu le plaisir de manger. C'est la raison pour laquelle nous leur avons consacré une revue complète. N'hésitez pas à la consulter.
Ressources
Panneaux informatifs sur site.
Mistra, Guide historique et archéologique, Myrtali Achimastou-Potamianou, Editions Hespéros, Athènes, 2013.
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